J’ai peur de parler français
Faire des fautes quand on apprend une langue étrangère, c’est normal et c’est même très bien ! C’est comme ça qu’on va progresser. Comment s’améliorer si on n’a pas d’abord fait une erreur ? La faute, l’erreur, ça fait partie du processus d’apprentissage même si, pour de nombreux étudiants, c’est générateur de stress ou même d’angoisse.
Dans cet article, tu vas apprendre, sans faire de fautes ;) - L'origine amusante du mot erreur - Pourquoi les étudiants ont peur de parler français - Différentes stratégies pour combattre cette peur - Des erreurs très fréquentes dans la bouche des Français (ça m'énerve !)
L’origine du mot Erreur
Est-ce que tu connais le verbe errer et le nom errance (féminin) ? Ces 2 mots de français assez soutenus sont de la même famille que le mot erreur. Pourtant, ils ont un tout autre sens… Si on recherche l’étymologie du mot erreur, on doit faire un petit voyage dans le temps, car erreur vient du latin errare qui signifiait partir à l’aventure.
Et bien entendu, quand on part à l’aventure – ça, c’était avant l’invention du GPS ;), il est possible ou même normal qu’on fasse fausse route, qu’on se trompe de direction…
La langue latine, dans un effort de précision, a alors inventé error, un autre mot qui voulait dire s’éloigner… du bon chemin, mais aussi s’éloigner de la norme, du dogme. Et voilà… C’est comme ça que l’erreur est née !
C’est joli, non ? Moi, j’aime bien l’idée que le mot erreur, tel qu’on l’utilise aujourd’hui, vienne du voyage qu’on fait avant d’arriver à destination…
C’est un peu ça, d’ailleurs : quand tu fais une erreur en français, tu dois cheminer, tâtonner, voyager dans ta tête avant d’arriver, finalement, à la forme correcte !
La peur de parler français
Je ne sais pas si c’est ton cas, mais je connais beaucoup d’étudiants qui apprennent le français, depuis longtemps parfois, et qui ont des sueurs froides quand ils doivent parler : ils n’ont pas encore commencé à communiquer que déjà ils s’excusent de leur mauvais accent, de leurs probables erreurs, ils bafouillent, ils cherchent leurs mots, ils en oublient tout ce qu’ils ont appris…
Et pourtant, ils sont souvent super motivés, ils ont vraiment envie de maîtriser le français, ils rêvent de pouvoir échanger avec aisance, avec des Francophones, sur des sujets divers.
Alors d’où leur vient cette peur de parler français ?
Les causes les plus fréquentes
Pour pouvoir se battre contre cette peur de parler français, il faut d’abord en connaître les causes. Et ça, c’est quelque chose d’assez personnel : ça dépend de chacun d’entre nous, de notre histoire personnelle par rapport à l’apprentissage, de notre rapport à notre langue maternelle, aux langues qu’on a apprises…
Je te propose de faire un petit test : je vais te citer différentes raisons que j’ai, au fil des années, entendues dans la bouche de mes étudiants quand ils m’expliquent pourquoi ils ont du mal à passer à l’oral. Et toi, tu vas cocher celles qui semblent correspondre à ta situation :
- Je suis timide
- Je n’ai pas l’habitude de parler : à l’école, on n’apprend pas ça
- Je comprends mieux que je ne parle
- Je ne trouve pas mes mots quand je parle en français
- J’ai peur d’être mal compris
- Je manque de vocabulaire
- Je vais être ridicule
- Je suis ennuyeux et pas rigolo quand je parle français
- Je suis nul en grammaire
- J’ai un accent pourri
- Et si jamais je dis un truc interdit, choquant… Et si je commets une bourde, un faux-pas ?
- J’ai peur d’être jugé
- Je parle comme un bébé (dans ma langue, j’ai une pensée structurée et sophistiquée…
- …, etc.
Alors, est-ce que tu t’es reconnu dans cette liste ? As-tu coché quelques-uns des items ?
S’il y a pour toi d’autres raisons qui font que tu n’oses pas parler français, écris-moi un petit message dans les commentaires : je fais la collection de toutes ces causes qui paralysent mes étudiants à l’oral 😉
Différentes stratégies pour combattre cette peur
Tu as peur de parler français ?
Pas de problème ! Docteur Priscilla pose un diagnostic sur ta pathologie et peut confirmer que tu souffres juste d’une petite crise passagère de Xenoglossophobie…
La xenoglossophobie… Tel est le mot pour caractériser ton état…
Et si tu arrives à répéter 5 fois xenoglossophobie sans te tromper et sans mourir de rire, alors ça veut dire que tu es déjà en voie de guérison !
En tout cas, ne t’inquiète pas, cette pathologie se soigne très bien !
Procédons pas à pas…
Tu parles français, bien ou mal… les Français t’admirent
Tu l’as peut-être remarqué si tu as l’habitude de voyager en France, mais la maîtrise des langues étrangères n’est pas la qualité première des Français 😉
Le Centre national d’étude des systèmes scolaires (Cnesco) a publié en 2019 une étude qui montrait que 75% des élèves de troisième avaient du mal à « se faire comprendre en anglais, à l’oral, dans une langue globalement correcte ».
La troisième, c’est la dernière classe du collège : les élèves français ont 14-15 ans et ils apprennent l’anglais depuis la sixième, c’est-à-dire depuis la première classe du collège (ils ont alors 10-11 ans).
4 ans pour ne pas arriver à « se faire comprendre en anglais, à l’oral, dans une langue globalement correcte », ce n’est pas vraiment génial !
Pour les adultes, le tableau est encore plus sombre… Dans une enquête publiée par Education First en 2017, les Français se classaient au 22e rang sur 27, parmi les pays de l’Union Européenne, pour leur (in)compétence en anglais. Et je ne te parle même pas de leurs connaissances dans d’autres langues étrangères !
Alors… Si toi tu parles la langue française, même si tu hésites, si tu bafouilles ou si tu as l’impression de mal la maîtriser, sache que pour les Français, tu es un héros !
C’est bon à savoir, non ? Ça rassure, ça fait du bien, c’est bon pour l’ego, ça booste ton moral et ta motivation… Rien de mieux pour te donner confiance en toi !
Car la voilà, la clé n°1 de la victoire sur ta peur de parler français…
C’est d’ailleurs la clé qui te permet de surmonter toutes les peurs, les appréhensions, les phobies : la confiance que tu as en toi, en tes capacités…
Des tactiques pour mieux comprendre
Si tu as des difficultés à comprendre les Français quand ils parlent, concentre-toi sur les mots que tu connais et accepte que tu ne vas pas tout comprendre, en tout cas, pas tout de suite. Et d’ailleurs, tu n’as pas besoin de tout comprendre : quelques mots suffisent bien souvent pour te permettre de reconstituer le message.
Bien sûr, tu dois aussi entraîner ton oreille, comme un champion de tennis travaille son service, son revers, son coup droit ! Et pour travailler ton oreille, rien de mieux que d’écouter, encore et encore.
Grâce à Internet, il est aujourd’hui super facile de s’entraîner à la compréhension auditive : tu peux écouter des chansons, regarder des films ou des séries (avec les sous-titres en français ou dans ta langue maternelle)…
Tu peux également profiter gratuitement des ressources que Christian et moi, on a créées pour toi : on poste chaque mois sur notre chaîne YouTube Learn French Fun 2 vidéos pour t’aider dans ton apprentissage du français.
Tu peux aussi t’abonner pour recevoir par mail notre newsletter hebdomadaire dans laquelle tu trouveras une vidéo avec des informations sur la France, les Français et la langue française.
Comprendre… Sans les mots
Tu as de la chance parce qu’en France en général, on est très expressif quand on parle : les Français gesticulent, ils font des mimiques, des grimaces, ils utilisent interjections et onomatopées…
Alors sois attentif, observe bien tous ces éléments qui constituent la communication non verbale : le langage du corps sera ton allié si tu as des problèmes à comprendre les Français.
Personne n’est parfait
Ce n’est pas possible de devenir bilingue du jour au lendemain. Et désolée, je n’ai pas de baguette magique pour t’y aider !
Pour parler français, il faut… parler ! Ça semble tout bête, mais c’est vrai : si tu te caches derrière tes livres, tes cahiers, tes applications d’apprentissage, ton dico en ligne, tu ne fais que retarder le moment où tu vas te mettre à parler.
Alors prends ton courage à deux mains, prends le taureau par les cornes, jette-toi à l’eau ! Wahoooo… Que d’expressions idiomatiques pour te dire de ne plus avoir peur !
Et bien sûr, n’oublie pas que nul n’est parfait… Tu es étranger, donc les Français s’attendent à ce que tu parles avec un accent, à ce que tu hésites, à ce que tu cherches tes mots, et que tu te trompes parfois.
Je sais combien ça peut être frustrant, mais à long terme, tu verras que c’est une stratégie payante. Plus tu parles et mieux tu parleras… C’est cool, non ?
Respire, reprends-toi et souris !
Et Si je suis bloqué, me diras-tu… Que faire ?
Et bien il faut faire ce que tu fais quand tu dois parler devant un public dans ta propre langue. Fais une pause, respire un grand coup, regarde ton interlocuteur dans les yeux et souris.
Tu sais bien que tout passe mieux quand on sourit !
Tu peux aussi exprimer ton problème, demander de l’aide, vérifier ton français avec de petites phrases toutes simples qui te laisseront le temps de te reprendre et… de profiter ainsi de cours gratuits, transformant ton interlocuteur en professeur :
- Désolé, je suis bloqué !
- Comment on dit ça en français ?
- C’était correct ce que j’ai dit ?
- J’ai bien prononcé ?
Ne te décourage pas !
Apprendre à parler une langue étrangère est certes une expérience enrichissante, mais c’est aussi déroutant, troublant, une vraie leçon d’humilité !
Car notre langue maternelle est bien plus qu’un outil de communication : elle constitue une partie intégrante de qui nous sommes, elle nous définit, au même titre que la manière dont on bouge, dont on rit, dont on interagit avec autrui…
Alors quand tu changes de langue, il se passe un tas de trucs bizarres : d’une certaine manière, tu perds un peu de ton identité et tu en endosses une nouvelle qui, peut-être, ne va pas te plaire au début.
Tu es timide en français alors qu’en vrai, tu ne l’es pas. Tu t’exprimes de manière simpliste, pourtant, dans ta langue tu as un esprit fin et intellectuel. Tu n’arrives pas à faire de l’humour en français et pourtant tu es normalement quelqu’un de très drôle et spirituel !
On traverse tous cette phase quand on commence à parler une autre langue.
Et on s’en remet, on survit !
Tu vas remarquer que certains jours, il te sera plus facile de parler français, c’est normal. Parfois, tu auras l’impression d’avancer à pas de géant et parfois de stagner, voire de régresser. Ça fait aussi partie de l’apprentissage !
Et puis arrive un jour ce moment incroyable où tu cherches un mot dans ta langue maternelle, il est là, tu l’as sur le bout de la langue et voilà qu’il sort… en français.
Ça aussi, ça peut faire flipper ! Quand on apprend le français, il y a des moments où l’on a l’impression de perdre certains petits bouts de sa propre identité linguistique parce que se superpose la langue apprise !
En tout cas, sache que, erreur ou pas erreur, plus tu parles français et plus ça deviendra facile pour toi de parler. Et de confronter ta peur te permettra de la surmonter.
Alors, tu n’auras plus peur !
Plus de peur de parler, plus de peur de l’erreur – ça s’appelle la lathophobie !
Les erreurs des Français quand ils parlent leur langue
Pour finir, je vais parler de quelque chose qui me hérisse : c’est quand les Français font des fautes quand ils parlent leur langue.
Je vais te donner une petite liste de ces erreurs. Elles sont omniprésentes, aussi bien dans la rue qu’à la radio ou à la télé, dans la bouche de Monsieur ou Madame-Tout-le-Monde (tu les connais ces deux-là ?), que dans celle des journalistes, des politiciens, des intellectuels…
Si tu tends l’oreille, tu pourras facilement les repérer et te dire que toi, tu ne les fais pas, ces erreurs-là !
- un espèce. Tu sais bien, toi, que ce mot est féminin, qu’on doit dire une espèce. Et bien la plupart des gens autour de moi, la plupart des intervenants dans les médias vont le métamorphoser en UN espèce de… Par exemple : le pan bagnat est une spécialité niçoise. C’est un espèce de sandwich rond avec tous les ingrédients de la salade niçoise à l’intérieur. Quoi ? Il a dit UN espèce ?
- après que + subjonctif. Non, non et non… On ne met pas de subjonctif dans ce cas-là : après que je sois sortie…(NON) ; après qu’il ait compris… (NON) ! On peut dire après que j’étais sortie ou après être sortie ; après que j’aurais compris ou après avoir compris, d’accord. Mais pas de subjonctif !
- si j’aurais su, je ne serais pas venue… Ça, c’est un grand classique. Dans les phrases d’hypothèse avec SI, il n’y a ni futur, ni conditionnel. On doit dire : Si j’avais su, je ne serais pas venue : si + plus-que-parfait + conditionnel passé ; Si je pouvais, je viendrais : si + imparfait + conditionnel présent ; Si j’ai le temps, j’irai te voir : si + présent + futur simple.
- il est allé travailler malgré qu’il soit fatigué : Niet, no, nein, non… On dit Bien qu’il soit fatigué, mais on ne dit pas Malgré qu’il soit fatigué. Malgré s’utilise avec un nom, pas avec un verbe : Malgré sa fatigue, par exemple.
- je dois aller au coiffeur : mais non, ça ne va pas, ça, il y a une erreur de préposition : aller chez + personne : On va au salon de coiffure (c’est correct : au est une préposition de lieu). Mais On va chez le coiffeur (le coiffeur, c’est une personne).
- c’est la voiture à Marie. Beurk, je déteste ça… Quand il y a un verbe, on dit La voiture appartient à Marie, elle est à Marie. Mais C’est la voiture de Marie.
- mille-z-excuses. Bon, même si on s’excuse 1000 fois, le mot mille va rester invariable. Alors c’est Mille excuses qu’il faut dire.
- c’est un étudiant que je me souviens bien… Et bien non, ce n’est pas possible de dire ça. Pas plus que de dire : c’est la voiture que j’ai besoin : se souvenir et avoir besoin fonctionnent avec la préposition de. Le pronom relatif que est donc faux et archi faux. On devrait dire C’est un étudiant dont je me souviens bien et C’est la voiture dont j’ai besoin.
Voilà, c’était juste un petit florilège, un best off des erreurs que font les Français quand ils parlent. Il y en a bien d’autres, rassure-toi, mais ça ira pour aujourd’hui 😉
J’espère que ça va te donner du courage pour parler et pour faire des fautes et pour recommencer et refaire des fautes… Jusqu’au jour où tu n’en feras plus.
En tout cas, pas plus que les Français eux-mêmes, tu vois.
Mais toi, tu as une excuse : tu es étudiant de français. Et en plus, tu es mon chouchou !…
Mais eux, qu’est-ce qu’ils m’énervent !
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